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Les Hébrides : une forte nature

Voici l’automne qui s’installe. Le moment idéal pour se remémorer la période des vacances, des vacances à vélo pour Jérôme et Chantal, dans une contrée septentrionale où l’été a précisément des allures d’automne. Du vent, de la pluie, un relief difficile, des moustiques, un environnement assez hostile a priori … mais aussi des paysages grandioses, une nature à l’état brut et un accueil chaleureux. Bienvenue au nord de l’Ecosse, dans les Hébrides extérieures, un beau récit de Jérôme, assorti de conseils pratiques et où l’oeil du militant reste toujours ouvert.

Plantons le décor. La route s’arrête là. Une dizaine de petites maisons basses, un parking désert, une aire de jeux. On n’entend que les cris des oiseaux de mer, et le moteur d’une tondeuse dont le propriétaire semble mettre un point d’honneur à entretenir soigneusement, à l’abri de maigres buissons, un minuscule carré de pelouse à l’allure très britannique. Au-delà de ce semblant de village, un chemin carrossable se perd dans les dunes, un autre rejoint un petit quai encombré de casiers, devant lequel patientent quelques bateaux au mouillage dans une eau turquoise, et une plage de sable blanc qu’un petit groupe de vacanciers partage avec un troupeau de vaches. A proximité du quai part un sentier qui s’éloigne vers une haute colline rocheuse. De l’autre côté, explique un panneau, on découvrira des villages abandonnés et de beaux points de vue sur les îlots plus au sud, mais il convient avant de s’y engager de s’équiper comme pour une marche en montagne : la météo ici est imprévisible, une forte pluie peut rendre certains passages impraticables, et le brouillard peut tomber très vite.

Les Hébrides. Bienvenue à Vatersay, l’île habitée la plus méridionale des Hébrides extérieures, cet archipel qui s’étire au nord-ouest de l’Ecosse, dernière terre européenne avant l’Islande et le Groenland, si l’on excepte le minuscule archipel de Saint Kilda (habité jusqu’en 1930, et administrativement rattaché aux Hébrides), et le mythique rocher de Rockall, qui a donné son nom à une zone de météo marine célèbre pour les tempêtes qui recouvrent souvent entièrement les 17 m de la pointe émergée de cet ancien volcan …

L’île de Barra est un modèle réduit des Hébrides,

collines, plages de sable blanc, routes paisibles.

Nous sommes bien en Ecosse : est-il hanté ?

Au sud des Hébrides, le bout de la route

La véloroute 780. La route commence ici. Et plus précisément la véloroute 780, qui relie Vatersay et Butt of Lewis, 240 km plus au nord, célèbre pour son phare construit par le père de l’écrivain RL Stevenson. En 1986, et après la noyade d’un taureau nommé Bernie qui venait de remporter un concours et regagnait sa pâture à Vatersay, les habitants de cette dernière ont exigé la construction d’une digue pour faciliter les échanges avec l’île voisine de Barra : c’est donc au sec, merci Bernie, que nous pouvons traverser, et rejoindre Castlebay, modeste chef-lieu de Barra, où nous avons débarqué la veille après plus de 5 heures passées sur le ferry depuis Oban. La véloroute 780 est célèbre : nous étions une douzaine de cyclistes à improviser un concert de sonnettes, sous la direction du facétieux marin chargé des opérations de débarquement, avant de grimper sur les hauteurs du petit port, qui mérite bien son nom : une baie parfaite, et, sur un îlot, les ruines d’un château dans lequel les tintinophiles auront bien envie de reconnaître son homologue de « L’île noire ».

Les montées sont souvent raides, mais en descente, quel plaisir quand le Macadam est lisse !

On passe d’île en île … La parcours de la véloroute 780, parfaitement jalonné, n’a pas dû être trop difficile à définir : pour l’essentiel, il emprunte la route principale, épine dorsale des îles, et souvent seule route … Le passage d’une île à l’autre se fait sur des digues, ou sur des ferries (entre Barra et Eriskay, et entre Berneray et Harris). Chaque île conserve son identité : après les collines de Barra et d’Eriskay, nous nous élancerons sur le « machair » de South Uist, appellation gaélique des pâtures fleuries entre plages et tourbières, dont le sol est fertilisé par les débris de coquillages apportés par le vent, avant de rejoindre l’austère et montagneuse Harris, via Benbecula, North Uist et Berneray. Puis nous traverserons les sombres tourbières de Lewis, sur laquelle Stornoway, 8 000 habitants, joue les capitales de l’archipel. Le trafic routier n’est pas dense, et les routes étroites souvent à voie unique. Les conducteurs locaux sont prudents, et profitent des « passing places » aménagés pour doubler ou attendre patiemment de croiser les cyclistes, toujours avec le sourire et un échange de salut. Le seul véhicule qui forcera le passage et nous obligera à mettre pied à terre sera… un camping car immatriculé en France. No comment …

La 780 relie le nord au sud des Hébrides 

en suivant surtout l’axe principal

qui n’a rien d’une autoroute.

Des places pour doubler ou croiser les cyclistes

Le temps est imprévisible … disait un panneau à Vatersay. Pour peu que le soleil se montre, la mer prend des couleurs dignes des archipels du Pacifique sud, on aperçoit des phoques assoupis sur les rochers. Un habitant de Harris nous a indiqué, l’air très sérieux, qu’il fallait leur chanter une petite chanson pour attirer leur attention : « Ils sont curieux et sensibles, un peu comme des chiens ». Mais le vent tourne vite, et souvent fort, et les sommets se noient alors dans le brouillard, laissant échapper des cascades, et les moutons, faces noires et cornes avantageuses, fiers de leur célèbre tweed, s’abritent derrière les rochers.

La tempête nous empêchera d’ailleurs d’aller jusqu’à la pointe nord de Lewis, et d’admirer au passage les célèbres alignements mégalithiques de Cavinish. Nous reprendrons plus tôt que prévu le ferry pour le « continent », et devront encore patienter à Ullapool, en espérant que la tente résiste au vent et aux trombes d’eau, avant de pouvoir reprendre la route. Profitant d’un vent encore bien fort, mais mieux orienté, nous effectuerons les 98 km de traversée des Highlands jusqu’à Inverness à 19km/h de moyenne, malgré 900 m de dénivelée positive … Inverness, c’est un retour à la ville (62 500 habitants) un peu brutal après le calme des Hébrides. C’est aussi une extrémité de la véloroute 78, dite « Caledonian way », que nous suivrons jusqu’à Oban, pour boucler la boucle.

Harris est l’île la plus montagneuse des Hébrides.

Harris …

Highlands …

En route pour le Loch Ness et le Ben Nevis

… et les aménagements cyclables variables. Les aménagements cyclables britanniques sont de qualité très variable. Souvent, le cycliste est assimilé au piéton, et doit partager avec lui des trottoirs parfois très étroits (et, dès lors que le panneau l’indique comme obligatoire, celui qui restera sur la chaussée se fera vertement, voire dangereusement rappeler à l’ordre par les automobilistes). De même, le cyclotouriste semble être mis sur le même plan que le randonneur pédestre. Ainsi, après avoir longé le loch Ness (nous avons vu le monstre, sous des formes très diverses, de la sculpture à la peluche, sur les rives, mais pas dans le lac) … ainsi donc, après avoir longé le Loch Ness sur de petites routes tranquilles, l’itinéraire nous a fait découvrir, principalement entre Fort Augustus et Fort William, de très jolis sentiers de forêts et de montagne, au revêtement souvent pierreux, qui devraient plutôt être réservés à des VTTistes chevronnés (montée maxi enregistrée : 16%). Pour mettre du piquant dans l’aventure, il pleuvait sans discontinuer, et le chemin était parfois barré (au sens le plus propre possible) par des barrières particulièrement difficiles à franchir (avec un seuil fixe à une trentaine de cm au-dessus du sol : nécessité d’être à deux pour porter chaque vélo)

Les aménagements cyclables sont de qualité variable, et parfois de très mauvaise qualité, surtout sous la pluie.

Sur la véloroute 78, près de Fort-William, de quoi faire perdre leur flegme à bien des cyclistes !

Près d’Oban, on compte les cyclistes pour les encourager à être plus nombreux.

les panneaux routiers sont bilingues, mais les aménagements cyclables de qualité variable

Un des points forts des aménagements : le jalonnement est rarement pris en défaut.

Heureusement, la dernière étape, entre Fort William et Oban, nous offrira, non pas une éclaircie, mais un itinéraire très agréable, succession de petites routes et de superbes voies vertes au revêtement faisant honneur à MacAdam, de son prénom John Loudon, enfant du pays, précurseur du « tarmacadam » (en abrégé « tarmac »), de « tar », goudron de houille, et du procédé lié à son inventeur : l’emploi de couches de granulométrie décroissantes.

Il y a encore à voir, à goûter, à visiter … L’arrivée à Oban a lieu lors d’une courte accalmie, le temps d’apercevoir le ferry pour Castelbay manœuvrer pour quitter le port. Nous ne repartirons pas pour un tour … Il y a pourtant encore de quoi voir, et après 650 km, nous n’avons pas épuisé les possibilités cyclotouristiques des Highlands et des Islands, ni goûté à toutes les variétés de maquereaux et saumons fumés, ni même visité une seule distillerie …

Attention aux loutres sur les digues

La faune locale, sauvage ou domestique …

semble aussi indifférente aux caprices de la météo
qu’a ceux des humains de passage 

Le monstre du Loche Ness est présent partout
sous des formes variées

L’équipement indispensable.
Les vélocistes sont rares, surtout dans les îles, les côtes nombreuses, plutôt courtes mais souvent raides : un bon vélo, un chargement réduit et un peu d’entraînement permettront de mieux profiter des vacances ! Il ne faudra pas oublier des vêtements très imperméables : vous n’échapperez pas à la pluie … Les midges, affreux et minuscules insectes qui volent en meutes agressives (s’ils sont là, c’est que le vent est faible, c’est la bonne nouvelle) sont un ennemi à ne pas négliger. Les répulsifs achetés en France les ont fait rire. Les produits locaux (Smedge) sont à peine plus efficaces. Il faut impérativement s’équiper d’une moustiquaire spéciale (maille très serrée, en vente partout sur place pour 5 euros) pour la tête, surtout si l’on campe. Ils n’arriveront pas à vous rattraper à vélo (sauf si vous montez trop lentement). Statistiquement, le mois de mai est le plus sec dans les Hébrides.

Comment s’y rendre ?
Depuis la Normandie, le plus simple est de prendre un ferry vers Portsmouth. De là, on peut continuer en voiture (Portsmouth-Oban : 865 km, soit une journée de route ; autoroutes gratuites jusqu’à Glasgow ; carburant environ 1,10 GBP/l en août 2016 ; vaste parking gratuit à Oban) ou en train (tous les trains acceptent les vélos, sur réservation pour les grandes lignes).

De Portsmouth à Londres, en s’y prenant à l’avance, on trouve des billets à 5/10 GBP. De Londres à l’Ecosse, des trains de nuit sont assurés par Caledonian Sleeper (www.sleeper.scot) et les vélos sont transportés gratuitement, si besoin en camion lorsque la capacité maximum du train est atteinte. Dans ce cas, on est prévenu à l’achat du billet et il faut déposer son vélo au plus tard deux heures avant le départ du train. On peut réserver plus d’un an à l’avance pour bénéficier de tarifs plus avantageux ; l’achat d’un forfait Britrail pass peut être intéressant. Les autocars (National express, Megabus) n’acceptent les vélos que démontés dans des housses.

La majorité des liaisons vers les îles écossaises est effectuée par Caledonian Mac Brayne (www.calmac.co.uk) à des tarifs peu élevés. Les vélos (emplacements spécifiques et cordes pour les maintenir) et leurs propriétaires (salons confortables) voyagent agréablement. Il existe en outre des tickets à prix réduit baptisés « Hopscotch » qui donnent droit à un aller simple sur tout un parcours. Par exemple, les 4 ferries nécessaires au trajet Oban-Ullapool : plus de 10h de traversées en tout pour 35 euros/personne (vélo gratuit) en août 2016.

Où dormir ?
Le camping est la solution la plus économique (tarification en général par personne : de 7 à 12 GBP). Le camping sauvage est autorisé par la loi écossaise sous certaines conditions. Il faut du bon matériel (tente bien étanche et résistante au vent) et une tente pas trop grande dans les îles (les espaces plats et relativement secs sont rares).

Nous avons particulièrement apprécié pour leur bon accueil et leurs aménagements (salle/cuisine commune) les campings de Barra (croft 183), Benbecula (Shell bay), Likisto (île de South Harris, pain maison offert chaque jour aux campeurs par le gérant, maquereaux selon la pêche, salon avec livres et jeux de société … mais camping vite très humide par temps de pluie !), Glencoe (entre Fort William et Oban). Attention : certains campings n’acceptent pas les tentes ; d’autres sont vite complets (Barra-Croft 183 : 5 emplacements pour tentes)

Les auberges de jeunesse, hostels, « bunk rooms » (dortoirs), « pods » (huttes) à louer dans les campings constituent une solution intéressante : on y est au sec pour un tarif acceptable (10/40 GBP par personne), mais la réservation préalable est indispensable en été. Les autres hébergements sont souvent très chers (minimum 60 GBP pour 2 dans un B and B très basique, et vite 150 GBP, parfois plus, dans un lieu touristique) et nécessitent une réservation préalable.

Ravitaillement.
Les magasins d’alimentation ont presque toujours une amplitude horaire très large (24h/24 et 7j/7 dans les agglomérations de quelque importance), sauf sur l’île de Lewis où tout est fermé le dimanche. Les prix sont un peu plus élevés qu’en France, surtout ceux des fruits et légumes (choix souvent réduit), mais à peu près identiques dans les grandes surfaces urbaines et les petits commerces de campagne. Dans les îles, les magasins ne sont pas très nombreux (un seul à Barra, un seul à South Harris) : nous avons apprécié d’avoir noté adresses et horaires avant le départ …

Quelques cafés et salons de thé, où le voyageur est le bienvenu même mouillé, permettent des pauses agréables. Ils proposent en général quelques plats et des pâtisseries. On profitera en particulier sur les îles des produits de la mer, saumons et maquereaux fumés en tête. Les curieux goûteront le haggis, panse de brebis farcie. Tabbert (Harris) a vu s’installer une distillerie indépendante, qui veut jouer un rôle social en créant des emplois sur des îles dont l’économie est vacillante : une bonne excuse pour s’y arrêter.

Les petits magasins d’alimentation
ne sont pas nombreux dans les îles

tous les ferries sont pourvus d’un emplacement pour les vélos, avec des cordes pour les attacher.

l’école primaire d’Ullapool ( 1 300 habitants)
affiche clairement sa volonté de voir ses 150 élèves
utiliser davantage leurs vélos.

Certains cyclotouristes s’éloignent des sentiers battus :
matériel adapté obligatoire – pneus, transmission,
économie de bagages.

Documentation.
Sustrans (sustrans.org.uk) est la fondation de promotion du vélo, et de planification des itinéraires, pour l’ensemble du Royaume-Uni. On peut acheter via son site cartes et guides. Nous avons apprécié le petit guide « cycling the Hebrides », très complet (itinéraires, profils, descriptions).

L’Ordnance Survey (équivalent de l’IGN) édite de magnifiques cartes au 1/25000 et au 1/50000. A vélo, on préfèrerait du 1/100000, mais ça n’existe malheureusement pas. On se contentera donc de cartes au 1/200000, moins agréables et néanmoins suffisantes pour s’orienter étant donné le peu de routes, mais le relief y est peu visible …

Sur Android, l’application gratuite Maps.me permet de télécharger des cartes correctes, avec un système de recherche et guidage à vélo qui fonctionne plutôt bien, mais pas de vision du relief.

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