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La voie centrale banalisée

Un aménagement cyclable d’avenir : la voie centrale banalisée …

La commune de Courseulles est réputée pour ses aménagements cyclables « hors normes », dans le sens négatif du terme. On y voit de « jolis » spécimens d’aménagements contraires au Code de la Route, aux normes du CERTU et à la logique, depuis la piste sur trottoir parsemée de poteaux et qui ne va nul part jusqu’à l’énigmatique panneau de jalonnement « vélo » pointant vers on ne sait où, en passant par la bande cyclable interrompue par un panneau « interdit aux vélos ».

Le réseau cyclable courseullais avait été amputé il y a deux ans d’un de ses maillons les plus intéressants : la portion communale de l’Eurovéloroute 4, qui longeait la mer. Même si l’aménagement lui-même était critiquable (mais ce n’était pas le pire !), la municipalité avait cédé aux cris des riverains ne supportant pas le bruit des chaînes rouillées sous leurs fenêtres. Quand on a garé sa voiture sur le trottoir, on est toujours gêné par les vélos qui passent en vous frôlant, c’est bien connu … Depuis, des travaux de réaménagement de la digue ont été menés, mais ils ont oublié les cyclistes : pour longer la côte, préférez le pédalo (ou la voiture).

La voie centrale banalisée. Et voilà qu’en ce printemps 2013, quelques nouvelles portions de bandes cyclables ont été tracées sur le bitume courseullais, un peu comme poussent des pâquerettes dans un jardin détrempé par la pluie. Certes, elles ne sont pas parfaites (il eut sans doute été préférable d’instituer un double–sens cyclable sur le quai des Alliés plutôt qu’une bande dans le sens de la circulation générale, et le tracé de la voie sur le parking au bout de l’avenue des Essarts est particulièrement risible …), mais elles permettent aussi d’entrevoir, et c’est une première régionale, un principe d’aménagement largement répandu aux Pays-Bas et en Suisse : la voie centrale banalisée, ou kernfahrbahn, que certains tentent de populariser en France sous le vocable « Chaucidou » (chaussée pour la circulation douce). On note aussi avec intérêt que celle-ci a vu le jour sur deux portions de rues récemment refaites (Avenues de la Combattante et de la Libération, les bien nommées), application stricte et tellement rare de l’article L228-2 du Code de l’environnement, qui prévoit la réalisation d’aménagements cyclables dès lors qu’il y a travaux de voirie en agglomération et pour lequel la largeur des voies n’est pas un obstacle à son application.

Y a pas la place ! La voie centrale banalisée est un concept très intéressant car il permet de répondre à l’argument mille fois entendu « on voudrait bien faire un aménagement cyclable, mais il n’y a pas la place ». Une chaussée classique avec deux belles voies de circulation mesure souvent 6 m de largeur. Le minimum pour assurer deux voies de circulation automobile « confortables » (pour les automobilistes) en milieu urbain (50 km/h) est de 5 m. En général, on trace une ligne médiane pour partager deux voies de 2,50m à 3,50 m. Sachant que la largeur minimale réglementaire d’une bande cyclable est d’1,50 m, et même si celle-ci n’est souvent pas atteinte, il ne reste dans cette configuration « pas de place » pour les vélos.

On peut alors instituer une « zone trente » pour apaiser le trafic, réduire le différentiel de vitesse entre automobiles et vélos et de ce fait assurer une meilleure cohabitation, en donnant aux cyclistes plus de sécurité et de confort. Mais, pour être efficace, une zone trente nécessite des aménagements physiques pour « casser » la vitesse, souvent coûteux et parfois gênants, voire dangereux, pour les cyclistes, ce qui est un comble (cf. article sur ce site sur les « coussins berlinois »).

Une solution simple, peu coûteuse, facile à mettre en œuvre et efficace est de réduire la largeur de la chaussée, de manière à rendre difficile les croisements de voitures. Les automobilistes ayant souvent davantage de respect pour leur rétroviseur que pour les cyclistes, ils hésitent à frôler la voiture d’en face, ralentissent, se déportent, et finissent par faire des politesses à tout le monde. Lorsque la réduction de largeur de la chaussée est assurée par deux bandes de peintures latérales dégageant de chaque côté (entre la bande de peinture et le trottoir ou l’accotement) un espace assez large pour être compris comme une bande cyclable, si le stationnement y est interdit et pour peu que la vitesse soit limitée à 30 km/h, on obtient pour le prix de la peinture un espace beaucoup plus convivial.

Ce principe est de plus en plus utilisé aux Pays-Bas, y compris hors agglomération. Dès lors que la création d’une piste ou d’une bande cyclable « classique » n’est pas possible faute d’espace, la priorité est donnée à un confort minimal des cyclistes au détriment de la vitesse et du confort de circulation des voitures, grâce à ces modifications de configuration de la chaussée. Plutôt que deux voies théoriquement « multiusages » mais sur lesquelles les vélos sont vite considérés comme des gêneurs, on donne la priorité à ces derniers en créant deux voies latérales, les automobilistes se partageant comme ils peuvent (quitte à s’arrêter et/ou à se déporter sur les bandes latérales) la voie centrale, large de ce qui reste (souvent 3 à 4 m.)

Ce principe a essaimé dans les pays germaniques, en Suisse en particulier, où il a acquis un statut officiel et un site internet dédié (en Allemand, mais les photos sont parlantes même pour des non germanophones : http://www.kernfahrbahn.ch/index.html)

… et en France. Peu à peu, on voit apparaître ce principe d’aménagement sur quelques rues ou routes françaises. La seule difficulté réside dans le statut des voies latérales, et dans le modèle de bandes de peinture et le type de signalisation à prévoir. En effet, on doit y permettre la circulation des cyclistes mais pas le stationnement des véhicules, comme sur une bande cyclable, mais on doit cependant y autoriser la circulation ponctuelle, voire l’arrêt, des voitures pour qu’elles puissent se croiser. Réglementairement, en France, la solution est de faire des « bandes multifonctions » : l’usage n’est alors pas réservé aux seuls deux-roues non motorisés, il n’est pas possible d’y peindre des logos « vélos » et encore moins d’installer des panneaux spécifiques. On doit cependant veiller à assurer une largeur minimale conforme à celle d’une bande cyclable, et à assurer la continuité, et éventuellement la priorité de ses usagers, dans les carrefours.

Le site de l’association Vélobuc (http://velobuc.free.fr/kernfahrbahn.html) fait un point complet sur ce sujet et sur les questions réglementaires.

Courseulles a préféré, et on peut lui donner raison, appeler un chat un chat : les bandes latérales des deux portions d’avenues aménagées sont des bandes cyclables, signalées par des bandes de peinture, des logos et des panneaux conformes. Cela ne peut que rendre les automobilistes encore plus réticents à y circuler et à s’y arrêter, et donc à n’y rouler qu’en cas de croisement vraiment délicat (deux camping-cars … ).

Ne reste plus qu’à espérer que cet aménagement ne fasse pas les frais, comme la piste cyclable sur la digue, de la colère des riverains, mais plutôt qu’il incite la commune à revoir sérieusement l’ensemble de ses aménagements cyclables, et qu’il serve d’exemple à suivre aux alentours : cette solution permettrait de rendre « cyclables » bien des rues et des routes à peu de frais !

Crédit photo Jérôme.

A Courseulles

A Courseulles

Campagne des Pays-Bas

Village Suisse (Argovie ?)

Quelque part aux Pays-Bas

Quelque part aux Pays-Bas

Quelque part aux Pays-Bas

Quelque part aux Pays-Bas

Quelque part aux Pays-Bas

Quelque part aux Pays-Bas

2 comments to La voie centrale banalisée

  • benoit

    Après avoir fais du n’importe quoi, Courseulles démontre que l’on peu faire des aménagements qui ne son pas futuristes et qui auront il faut l’espérer de l’avenir!!!

  • c corbin

    De la même manière que Dérailleurs essaie de prendre contact avec les municipalités pour leur rappeler le règlement en matière de nouvelles voiries, l’association pourrait se rapprocher du maire de Courseulles pour l’encourager à développer ce genre d’aménagement ailleurs dans sa commune et en faire la promotion : un moyen de devancer les protestations des chauffeurs irascibles et de favoriser l’essaimage de telles pratiques.